Marguerite Duras, jamais oubliée

 

Il y a vingt-et-un ans, le 3 mars 1996, Marguerite Duras s’est éteinte à l’âge de 82 ans. Considérée comme l’un des plus grands auteurs de la littérature du XXe siècle, son écriture continue d’éblouir le public. Retour sur une écrivaine à la plume tenace, parfois incomprise, qui aura marqué de nombreux esprits.

 

Ekatérina Soldatova
3 mars 2017

La vie de Marguerite Duras semble avoir été un défi. L’écriture a sûrement été pour elle un moyen de rester tout de même rattachée à cette existence qui l’a souvent malmenée. Une forme d’expression qui reviendrait à un besoin, une nécessité.

Lorsqu’en 1984, Marguerite Duras publie L’amant, après une vingtaine d’ouvrages, elle assoit définitivement sa notoriété dans le monde littéraire. Retour frappant sur son enfance passée à Saigon, ce roman se caractérise par un style fulgurant.

Vingt-et-un après sa disparition, il n’est toujours pas aisé de catégoriser l’écriture de l’auteure française. Ses livres sont souvent assimilés au Nouveau roman, un courant littéraire visant à renouveler le genre romanesque. Les trames des récits sont floutées, ce qui déconcertait le public de l’époque. Son style asyntaxique récurrent, elliptique et haché rappelle la façon dont Giacometti avait de dépouiller ses sculptures pour parvenir à la limite de la disparition de ses personnages. Ainsi, l’écriture de Duras, c’est l’expérience de la limite du langage.

Mais pourquoi cette volonté persistante de briser la langue? On pense alors aux deux guerres mondiales, à la crise existentielle, au point d’inhumanité, de non vie et on comprend. On saisit, surtout à travers le paradoxe beckettien, pourquoi écrire devient si difficile. Beckett était confronté à l’impossibilité d’exprimer et en même temps à l’obligation de le faire. En d’autres termes: comment rendre compte d’une existence fracturée qui n’admet aucun retour en arrière? Certainement pas à travers une écriture limpide et lyrique.

Mais Duras ne cherche pas uniquement un moyen d’exprimer l’indicible. Elle aborde également les amours impossibles dans Le Ravissement de Lol V. Stein ou Les yeux bleus cheveux noirs. Des récits de personnages presque vides de sentiments. L’auteure française s’est également consacrée au cinéma avec quelques adaptations à ses œuvres littéraires. On songe notamment à Un barrage contre le pacifique, autre retour sur son enfance.

L’écrivaine a également rédigé nombre d’articles, pour des raisons financières, mais aussi politiques. Marguerite Duras était donc une femme des lettres, mais aussi une femme de notre monde.

Nom de plume de Marguerite Donnadieu, l'écrivaine est née en avril 1914 à proximité de Saigon, ville située dans l’Indochine alors française, elle y passe une enfance globalement triste et précaire. Son père décède tôt. Elle reste alors avec sa mère et ses deux frères. Les relations familiales sont conflictuelles. Sa mère, institutrice, ne parvient pas à subvenir aux besoins de sa famille. La situation s’aggrave lorsqu’elle investit toutes ses économies dans une concession qui s’avère incultivable. Duras finit par quitter l’Indochine pour la France afin de poursuivre ses études. Et sa vie d'auteure et d'artiste.